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Richard Avedon, Photographies 1946 - 2004

Richard Avedon est un personnage emblématique de la photographie du XXème siècle. Il a très bien gagné sa vie avec la photographie de mode et la publicité. Il incarne la réussite à l’américaine et le mythe du photographe de mode des années 50. Il n’a pas 34 ans quand Paramount Studio lui consacre une comédie musicale, « Funny Face » avec Fred Astaire dans le rôle du photographe (Dick Avery) et Audrey Hepburn du modèle, Avedon est alors engagé comme consultant. Ce beau livre est édité dans le cadre d’une exposition qui a entamé un grand périple, qui a trouvé son origine en 2007 au Danemark, au Musée Louisiana. Elle s’est installée ensuite à Milan au cours du premier semestre 2008, elle est présentée à Paris jusqu’au 27 septembre au Jeu de Paume. La version parisienne s’est enrichie d’une quarantaine de clichés de la série "In the Americain West". Cette rétrospective voyagera ensuite en Allemagne, aux Pays-Bas et aux Etats-Unis.

Sandra Bennett, 12 ans rocky ford, Colorado 23 août 1980
© Richard Avedon

Dans un documentaire de 1995, d’Helen Whitney, consacré à Richard Avedon, le photographe confie au spectateur qu’il a réalisé ses meilleures photos à l’âge de 60 ans. Il fait référence à cette série de portraits qui fut exposée à partir de 1985 sous le nom de « In the American West ». Avedon va travailler pour cette commande du Amon Carter Museum (Texas) pendant cinq ans. Il parcourra ainsi 17 états de l’ouest américain entre 1979 et 1984 et réalisera une fresque de 750 portraits d’hommes et de femmes inconnus. Le livre, quifaisait office de catalogue du Amon Carter Museum en 1985, est devenu un objet de collection qui se vend parfois plus 300 euros dans les librairies spécialisées. Thames and Hudson a réédité cet ouvrage en 2005 on le retrouve aussi sur les tables des libraire.
La carrière de Richard Avedon se déroulera sur cinquante neuf années. Il a été découvert très jeune par Alexey Brodovitch dans le cadre de ses études à l’école « The Desing laboratory » dont Brodovitch était le fondateur, il était également le directeur artistique de Harper’s Bazaar. Avedon deviendra directeur de la photographie chez Harper’s Bazaar puis chez Vogue, le photographe du « The New Yorker » et travaillera notamment pour la revue française Egoïste, life, Rollins Stone Magazine…. Tout le gotha artistique international et de nombreux hommes politiques américains sont passés devant l’objectif du photographe.

Billy Mud, chauffeur de poids lourd, Alto Texas , 7 mai 1981
© Richard Avedon

Cet ouvrage et l’exposition ont le mérite de révéler au public que Richard Avedon, n’a pas été qu’un photographe de mode, il a aussi travaillé sur des reportages sans rapport avec cet univers comme :
  les hôpitaux psychiatriques en Louisiane (1963). Sa sœur cadette née en 1925 a passé plus de 20 ans en institution psychiatrique pour y mourir à 42 ans. Elle fut l’un de ses premiers modèles quand il était enfant.
  le mouvement des droits civiques, il fait le portrait de militants (1963),
  les dernières années de la vie de son père atteint d’un cancer (1969 à 1972),
  la paix au Vietnam, ses images de personnes mutilées par le napalm ont bouleversé l’opinion publique (1971),
  La commémoration du bicentenaire de l’élection présidentielle américaine, qu’il couvre par une série de portraits de personnes influentes, hommes politiques, banquiers… (1976, commande de Rolling Stone Magazine),
  In the American West, (entre 1979 et 1984), cette série le positionne comme l’un, si ce n’est, le plus grand portraitiste de son époque,
  la chute du mur de Berlin en 1989,
  les préparatifs de l’élection présidentielle américaine (2004), il décède d’une hémorragie cérébrale à 81 ans avant d’avoir terminé cette commande du New Yorker.

Sa série « In the American West », ressort incontestablement comme son travail le plus fort. Il a photographié des gens ordinaires avec la même attention et la même technique que les plus célèbres du monde. Il a ainsi dressé une fresque humaine de gens humbles, voir de pauvres gens, mineurs, ouvriers de champs pétroliers, ouvriers d’usine, chauffeurs, caissières, serveuses, femmes au foyer, chômeurs, vagabonds, prisonniers. Comme pour les stars il n’a pas cherché à les mettre à leur avantage, la netteté des images révèle tous les défauts de la peau. Ils sortent tout droit de leur atelier, de leur lieu de travail, leurs vêtements sont sales, ordinaires. Nous sommes en face de ceux qui ne font pas partie du rêve américain, les laissés-pour-compte de la croissance. Pour la plupart des photos il est impossible de les dater, elles auraient bien pu être prises hier. Cette intemporalité donne encore plus de force aux images qui nous interpellent près de 30 ans après car elles sont toujours d’actualité et ont pris une dimension universelle.
Sa mise en scène est immuable, elle définit son style, ainsi parmi 100 images on reconnait le portrait réalisé par Avedon. Sa recette : un fond blanc, un cadrage qui va du haut de la tête au ventre, le modèle regarde tout droit vers l’objectif, l’expression du visage est souvent triste, grave ou mélancolique, le cadrage est parfois décentré. La force de l’image réside au-delà de cette mise en scène, elle provient aussi du talent du photographe à dialoguer avec les gens qu’il photographie. Il les dirige comme des acteurs, les amène à sortir d’une pose conventionnelle, c’est enfin lui, qui choisit le cliché qui correspond à ce qu’il attend.

Dovima avec les éléphants, robe du soir Dior, CIrque d’hiver de Paris, août 1955
© Richard Avedon

Aussi, il ne faut pas manquer l’exposition « Richard Avedon » qui se tient au jeu de Paume où l’on admirera ses images exposées pour la première fois en France. On y voit comment à la fin des années 40, Richard Avedon a rajeuni la photo de mode en donnant vie au mannequin, en le faisant sauter, bouger sourire, alors que son rôle, se limitait avant à celui d’un portemanteau, au mieux à une statue. Son originalité a consisté aussi à faire sortir le modèle du studio et à le mettre en scène dans la rue sous un éclairage naturel, dans des situations amusantes ou inattendues. On a tous en mémoire l’image de 1955 devenue célèbre de Domiva habillée en Dior posant entre deux éléphants du cirque d’hiver de Paris, que l’on trouvera juste après avoir franchi l’entrée de l’exposition.

Le site de la fondation Avedon

Richard Avedon, Photographies 1946 - 2004
Photographe : Richard Avedon
Relié : 192 pages
Editeur : Hatje Cantz (15 mai 2008)
Langue : Anglais
ISBN-10 : 3775721134
Prix : 40 euros