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Georgia O’Keeffe / John Loengard Peintures et photographies

Pour Gérard de Nerval « La patience était la plus grande des vertus des initiés antiques. ». Il aura fallu de la patience à Lothar Schirmer qui est à l’origine de ce livre car il aura du attendre 12 ans pour pouvoir présenter en vis à vis, les photographies de John Loengard et les peintures de Georgia O’Keeffe. En 1994, Lothar Schirmer se limitera à éditer les photos de Loengard, attendant que la succession de Georgia O’Keeffe veuille bien lui donner le droit de publier les reproductions des tableaux de l’artiste.

© John Loengard

La peintre américaine Georgia O’Keeffe est une des figures de proue des modernistes du XXe siècle. Elle commença par exposer ses toiles dans la galerie du photographe Alfred Stieglitz. Stieglitz est le créateur de la galerie 291 dans la 5e Avenue et il fit connaître au nouveau monde l’art européen d’avant-garde. Il exposa ainsi des artistes comme Matisse, Picasso, Brancusi, Picabia entre 1908 et 1915. Georgia O’Keeffe devint sa femme et son modèle. En 1946, à la mort de son mari, Georgia partit vivre seule à Ghost Ranch au sein d’une réserve d’indiens dans le désert du Nouveau-Mexique. Elle mourut à 99 ans à Santa Fé.

C’est à l’occasion d’un reportage pour le magazine Life, en juin 1966, que John Loengard a rencontré l’artiste qui peignait encore à l’age de 78 ans. D’un accord tacite ils ne parlèrent ni l’un, ni l’autre de leur travail. La seule exigence de Georgia O’Keeffe a été de ne pas être photographiée en train de peindre. Loengard a passé trois jours avec elle, retournant chaque soir dans son hôtel à Santa Fè, qui se trouvait à 120 km de là. Il l’a accompagnée dans sa promenade matinale, dans sa promenade de fin de journée, dans son jardin. Il lui a parfois demandé de poser et elle a accepté.
A son retour, les photos de Loengard ne furent pas publiées, l’article resta dans un tiroir. Plus d’une année passa, Loengard pris à nouveau le chemin de Ghost Ranch en vue de faire la couverture de Life avec un portrait de Georgia pour ses 80 ans. Il réalisa alors quelques photographies de l’artiste. L’article et les photos ne parurent pas pour l’anniversaire de Georgia O’Keeffe. Ce n’est que 4 mois plus tard, que 16 photographies illustrèrent un grand article intitulé Georgia O’Keeffe – Strong Visions of a Pioneer Painter !

Les tableaux les plus connus de Georgia O’Keeffe sont des fleurs très colorées, très fraîches et sensuelles. Sa retraite dans le désert l’a conduite à des représentations plus minérales, des paysages de montagnes arides, d’os de bêtes blanchis pas le soleil, de pierres, de murs en torchis. La fraîcheur de la vie a disparu mais les couleurs vives et le bleu pur du ciel sont toujours là, un ciel vers lequel est dressé une échelle… L’univers de l’artiste semble davantage tourné vers l’issue inéluctable qu’est la mort, l’aridité de son environnement et la solitude. John Loengard au cours de son reportage a capté cet univers très dépouillé, les têtes de squelette d’animaux alignés sur un rebord de fenêtre ou attachés à un mur, le patio inondé de lumière, l’échelle posée le long de la maison pour accéder la terrasse, les paysages montagneux où la caillasse jaillie à la place d’une cascade.

L’œil de Lothar Schirmer est aguerri, il a vu tout de suite les similitudes qu’il y avait entre les tableaux colorés Georgia O’Keeffe et les photographies noir et blanc de John Loengard. En pénétrant durant trois journées dans la vie de l’artiste, Loengard nous fait découvrir que sa peinture est le reflet de son environnement immédiat. Cet environnement ; tout autant dépouillé que ses tableaux, contrasté par l’éclairage violent du désert, baigne dans un bleu pur d’un ciel sans nuage.
Il est fréquent que le peintre utilise la photographie pour nourrir sa toile, ici la photographie vient nous éclairer sur la source d’inspiration d’un peintre. C’est toute l’originalité de ce beau livre, il nous dévoile aussi les petits secrets d’une vielle dame qui collectionne les pierres qu’elle ramasse dans le désert.

John Loengard est né à New York en 1934. En 1961 il devint collaborateur permanent de Life. Un grand nombre de ses clichés publiés dans les années 60, y compris le reportage "Georgia O’Keeffe", sont considérés aujourd’hui comme des classiques du genre. John Loengard a largement contribué à la "résurrection" de Life sous forme de mensuel, en 1978, et en est resté directeur du Service photo jusqu’en 1987. Plusieurs publications lui sont consacrées et saluent son talent.
Source la Bibliothèque des Arts

Peintures et photographies : Une visite à Abiquiu et à Ghost Ranch
Georgia O’Keeffe (Peintre) John Loengard (Photographe)
Lothar Schirmer (Auteur), Odile Demange (Traduction)
Relié : 79 pages
Editeur : Bibliotheque Des Arts Suisse (avril 2007)
Langue : Français
ISBN-10 : 288453136X
Prix : 35 euros